« Appel autour d’une esquisse de programme alternatif commun pour faire face aux manœuvres du président-politicien » (WalfQuotidien du 26 septembre 2017)

Mercredi 27 Novembre 2024

Mody Niang

En janvier 2017,  je lançais un appel à mes compatriotes, appel dont le titre était : « Pour un large front républicain, face aux apparences bavardes et trompeuses de la nauséabonde gouvernance du président-politicien ». En lançant cet appel, que Le Quotidien et WalfQuotidien m’avaient publié respectivement les 14 et 16 de ce mois, je ne me faisais aucune illusion sur les réactions positives qu’il pouvait provoquer chez mes compatriotes, dont la lecture n’est pas le point fort pour nombre d’entre eux. Je ne m’étais pas tout à fait trompé : des réactions, il y en a eu, mais pas beaucoup. Je ne m’en suis pas découragé pour autant. J’ai décidé de le redimensionner et d’en faire trois contributions publiées par WalfQuotidien et dont la première est celle-ci. Je rappelle que j’introduisais ainsi le prétentieux Appel des 14 et 16 janvier :  

 

« Il a gagné ses élections législatives, de la manière que l’on sait, et se retrouve avec une majorité confortable, voire écrasante. Il a reconduit son Premier ministre et nommé un gouvernement de 39 membres qui siègent, au conseil des ministres, à côté de quatre ministres d’État sans portefeuille, payés quatre (4) millions de francs CFA par mois. Quarante-trois ministres, sans compter les ministres conseillers spéciaux et ministres conseillers dont personne ne connaît le nombre exact, peut-être pas même celui qui les a nommés. Nous sommes loin, très loin d’un gouvernement de 23 à 25 membres au plus qu’il s’engageait à nommer, ‘’pour plus d’efficacité’’. Plus de gouvernement encombrant dont les membres se bousculent dans la salle du Conseil des ministres, affirmait-il avec force, mais sans conviction. On en a le cœur net aujourd’hui. »

 

J’annonçais ensuite que je n’allais surtout pas m’attarder sur les élections législatives les plus carabinées qu’on ait jamais organisées dans ce pays, au moins depuis le Code électoral de 1992. Ni  sur la parole de ce président-politicien qui ne vaut plus rien, qu’il renie à la moindre incartade, au gré de ses intérêts politiciens du moment. En matière de wax-waxeet, il dépasse son prédécesseur de plusieurs crans. Sans état d’âme donc – en a-t-il en réalité –,  il a nommé un gouvernement de continuité de 43 membres, un gouvernement très politique, très politicien, qui a pour mission exclusive de le faire réélire dès le premier tour. C’est un secret de polichinelle qu’il craint un second tour, encore plus une défaite, comme la peste et le choléra, et mettra tout en œuvre pour l’éviter. Il mettra tout en œuvre, vraiment tout, pour juguler cette lugubre catastrophe. Il ne lésinera sur aucun moyen, aucun vraiment pour atteindre cet objectif.

 

Des moyens, il en a à foison, en usera et en abusera. Il dispose, outre son fameux décret,  de Fonds spéciaux pratiquement illimités. D’ores et déjà, il a fait de certains ministères – du moins selon certains observateurs – de véritables vaches dont les mamelles regorgent de lait au point de raser le sol. C’est le cas, en particulier, du Ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, et de celui du Pétrole et des Énergies, confiés à deux de ses très proches, Abdoulaye Daouda Diallo et Mansour Élimane Kane. Un autre proche, Ministre de l’Économie, des Finances et du Plan, leur facilitera la tâche s’il y a lieu, et il y aura sûrement lieu. Ce ministre, Amadou Ba, ancien Directeur général des Impôts et Domaines (DGID), joue un rôle essentiel dans la mal gouvernance financière du pays.

 

Une autre vache à lait ou que l’on peut considérer comme telle, la Caisse de Dépôt et de Consignation (CDC), qui gérerait plus de 200 milliards de francs CFA et d’énormes ressources foncières, est confiée à son frère cadet. Pourtant, il avait pris l’engagement formel – un de plus sans lendemain – à ne jamais prendre un décret pour le nommer à quelque fonction que ce soit. Selon de nombreux observateurs, ce frère serait loin, très loin d’avoir le profil de l’emploi. En outre, son nom a été cité dans plusieurs affaires non encore élucidées. Malgré tout, et malgré son engagement solennel public, il l’a bombardé à ce poste stratégique. Je ne suis pas sûr que le président Macron en ait un. Mais, s’il en avait, il ne lui viendrait jamais l’idée de le nommer à un poste aussi important. Ce serait un gros scandale en France, où il laisserait sûrement beaucoup de plumes. Plus que des plumes d’ailleurs.

 

De nombreuses directions, agences et autres structures (Centre des Œuvres universitaires de Dakar, Société nationale de la Poste, Port autonome de Dakar, Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes, etc.), joueront probablement leur partition dans la mission confiée à Bennoo Bokk Yaakaar, et principalement à l’APR, de faire réélire leur mentor dès le premier tour, le 24 février 2019. Á la tête de ces structures, on retrouve notamment deux de ses très proches, responsables de l’APR. Il s’agit, bien entendu, de Cheikh Oumar Ane et de Ciré Dia,  respectivement Directeur général du Centre des œuvres universitaires (COUD) et de la Société nationale de la Poste.

 

Le président-politicien dispose de nombreux autres atouts pour réaliser son rêve. Il s’appuie, en particulier, sur un ministre (de l’Intérieur) et une administration (centrale comme territoriale) pratiquement acquis à sa cause. On peut aussi compter parmi ses atouts une Commission électorale nationale autonome (CÉNA) à bout de souffle. S‘y ajoute sa capacité de manipulations amplifiée par une télévision aux ordres exclusifs de son parti, de sa famille et, à un moindre degré, de ses alliés dociles qui se contentent des miettes qu’il veut bien leur distribuer.

 

Il ne s’arrête pas en si bon chemin. Il dispose d’ « atouts » multiformes dont la détestable transhumance qu’il exploite à fond. Cette tâche est facilitée par l’attachement morbide d’une certaine classe politique, d’une certaine société civile et de nombreux chefs dits religieux, à l’argent et aux honneurs. Or, de l‘argent, le président-politicien et son clan en ont à foison. Ils disposent, il convient de toujours le rappeler, d’un énorme trésor de guerre, dont le moins des avertis des Sénégalais sait comment il est alimenté. S’y ajoute son fameux décret qu’il a toujours en bandoulière pour ouvrir la porte des « honneurs » aux hommes et aux femmes qui n’ont plus cure du sens de l’honneur et de la dignité.

 

Nous reviendrons sur ces nombreux « atouts ». En attendant, nous pouvons affirmer, en nous fondant sur des faits précis, que ce président-politicien est pire que tout : il est la concentration de tous les vices que l’on peut imaginer. Il ne reculera devant aucune vilénie pour se faire réélire par tous les moyens, y compris par les plus illégaux. Cette réélection est pour lui et pour son clan une question de vie ou de mort. Sa nauséabonde gouvernance a tellement accumulé de scandales qu'il craint comme la peste d'être battu. Car, il sait que, dans ce cas, ce sera la pire des catastrophes pour lui et les siens. Son vieux prédécesseur et sosie a sur lui l'avantage de l'âge: le Sénégal se mettrait toute la communauté internationale sur le dos, s'il embastillait un vieillard de 90 ans (pourtant il le méritait largement). Lui, Macky Sall est jeune, du moins relativement. En cas de défaite, il sait ce qui l'attend, lui, sa famille, ses amis responsables APR, et nombre de membres de sa très soumise coalition Bennoo Bokk Yaakaar. Il mettra tout en œuvre pour éviter cette lugubre perspective (pour eux, bien entendu). Il a commencé d'ailleurs à mettre en place les stratégies les plus tordues pour être réélu dès le premier tour. Il compte déjà sur trois chevaux boiteux pour réaliser ces vilaines stratégies : le parrainage, la pauvreté et l'analphabétisme pour près de 50% de nos populations. Avec le parrainage, il va faire invalider – si on le laisse faire évidement – toutes les candidatures qui sont susceptibles de constituer de rivaux sérieux capables de lui compliquer sa sale besogne ? Pour cela, il peut compter sur un conseil constitutionnel dont la majorité de nos concitoyennes et de nos concitoyens considèrent que ses membres lui sont soumis. Et tout indique qu'ils ont raison, si considère certains antécédents. Le président-politicien compte sur d'autres magistrats impliqués, par leurs fonctions, dans le processus électoral.

 

Outre ce mur pratiquement infranchissable pour les candidats qui peuvent le gêner, il enfourchera le second cheval : la pauvreté de nos populations, du moins de nombre d'entre elles. C'est devenu un secret de polichinelle qu'il est assis sur un énorme trésor de guerre alimenté, pour l’essentiel, par nos pauvres deniers. Il est pratiquement sûr que c'est avec l'argent qu’il va se faire plus facilement réélire. Comme son vieux prédécesseur et sosie, il croit que nous avons tous un prix. N'est-ce pas que c'est ce vieux prédécesseur (prédateur) qui disait, à propos de nous Sénégalaises et Sénégalais, « que nous avions du mal à nous souvenir de notre dîner de la veille, et que nous ne croyions qu'à l'argent et aux honneurs ». Et, c'est à partir de cette conception peu valorisante qu'il nous a gouvernés pendant douze longues années. Son successeur et « fil » a emprunté la même voie. Depuis plusieurs mois, il fait montre d'une « générosité » déferlante et débordante. Au vu et au su de tout le monde, il reçoit des délégations au palais de la République (devenu le « poulailler de la république ») et distribue des millions de francs à tout va. Ses ministres et autres directeurs généraux et directeurs lui prêtent main forte tous les vendredis, quand ils « descendent sur le terrain », conformément à ses instructions. Son épouse n'est pas en reste : elle étonne, elle aussi, par sa « générosité » sans borne. 

 

Le président-politicien exploite aussi sans état la pauvreté de nos populations par ses bourses dites familiales qui sont une véritable escroquerie politique. Le montant de cette bourse est de 25.000 francs CFA que reçoivent, tous les trois mois, des chefs de familles triés sur le volet. En d'autres termes, en un an, nos « privilégiés », à la tête d'une famille qui peut compter jusqu'à 30 à 40 membres, perçoivent 100.000 francs CFA. Cent mille francs tous les ans, distribués à la tête du client ! Et on les menace de perdre ce « privilège », s'ils ne votent pas le moment venu pour le « généreux » président-politicien car, s'il n'était pas réélu, les nouveaux gouvernants supprimeraient la bourse familiale dès les premiers mois de leur gouvernance. Il faut insister surtout sur l'escroquerie politique que constitue cette fameuse bourse de sécurité familiale. Rappelons que le montant est de 25.000 francs par trimestre, 25.000 francs de nos impôts, de notre sueur. Pendant ce temps, le ministre du président-politicien reçoit chacun, pour seule indemnité représentative de logement, un million (1.000.000) de francs CFA par mois, sans compter son salaire dont le montant est de quatre (4.000.000) de millions de francs. Je ne m’attarde pas sur les véhicules rutilants, le carburant qui coule à flots, et les autres nombreux avantages invisibles.

 

Je ne passerai pas sur trois ministres d’État qui tournent les pouces auprès du président-politicien. Outre leur indemnité de logement d’un million, ils perçoivent, selon mes dernières informations, un salaire mensuel de cinq (5.000.000) millions de francs et nous coûtent annuellement 180.000.000 de francs (eux trois). Presque pour rien. Pour rien d’ailleurs, sinon pour mobiliser les militants. Combien de ministres sont-ils nommés par le président-politicien ? Combien de ministres conseillers ? Combien de conseillers spéciaux ? Combien de chargés de mission ? Combien d’ambassadeurs dits itinérants et qui ne sortent pratiquement jamais du pays ? Lui-même, qui nomme, ne le sait pas. Combien sont-elles, les agences nationales dont les directeurs généraux parfois venus de nulle part, perçoivent des salaires mensuels de quatre à cinq millions et parfois plus, sans compter les budgets qu’ils gèrent comme leur propre argent ? Dans ces conditions-là, est-il seulement décent de nous tympaniser avec cette maigre bourse dite familiale de 100.000 francs par an ? Notre président-politicien exploite aussi à fond l’analphabétisme de nos populations, en les manipulant et en frappant leur imagination à longueur d’années, en particulier lors de ses interminables inaugurations d’infrastructures. De ces infrastructures coûteuses et pratiquement sans impacts positifs significatifs sur la majorité des populations. Si on commençait par l’autoroute « Ila Touba », qui va nous coûter 416 milliards de francs CFA ! Elle relie Thiès et Touba, distantes de seulement 112 km, à travers un terrain sablonneux et avec comme seuls obstacles quelques rares arbres. Quand elle sera terminée, elle sera sûrement exploitée à leurs seuls profits par les Marocains, les Turcs, les Français ou les Chinois.

 

Si les populations de la ville de Touba avaient à donner leur avis, elles n’auraient sûrement pas choisi cette autoroute-là. Différentes télévisions nous ont présenté Touba, lors des pluies diluviennes de ces cinq ou six derniers jours. Pratiquement, toutes les maisons, les commerces, les stations d’essence, etc., étaient envahis par les eaux de pluie mélangées aux eaux usées nauséabondes. Beaucoup de gens sont sortis de leurs maisons. Pourtant, combien de milliards le politicien sénior et le politicien Jr ont-ils déclaré avoir investis dans l’assainissement de la ville ? Où sont-ils passés, ces milliards-là ?  L’assainissement est un véritable problème pour Touba, une véritable priorité. Une autoroute, même de dernière génération – la trouvaille de nos politiciens – n’était sûrement pas la préoccupation des populations. Á la place, elles préfèreraient de loin l’assainissement de leur ville. Elles auraient aussi opté pour l’eau potable qui leur fait terriblement défaut. Une ville comme Touba avec, dit-on, deux à trois millions d’habitants sans eau potable alors que, à quelques encablures, à Touba Bogo exactement, git une abondante nappe phréatique d’eau douce qui pourrait faire boire les populations pendant cent ans au moins, dit-on. Elles auraient aussi choisi sans hésitation la réhabilitation, l’équipement des infrastructures sanitaires, et leur dotation en médicaments, en équipements, en personnels qualifiés et en nombre suffisant. L’hôpital de Matlaboul Fawzéni serait alors prioritaire. Comme « Ila Touba », le président-politicien a opté pour un autre investissement de prestige, un investissement lourd. Il s’agit de ce fameux Train Express (TER) régional qui va nous coûter les yeux de la tête : plus 1000 milliards francs CFA pour relier l’Aéroport international de Diamniadio à Dakar, sur 54 km. Un TER dit de dernière génération alors que, pour tout patrimoine en matière de chemin de fer, nous n’avons que le branlant « petit train bleu ».   

 

Ces deux infrastructures, « Ila Touba » et le TER, sans doute fortement surfacturées, ne nous coûteront pas moins de 1500 milliards de francs CFA, qui auraient pu être orientés plus utilement ailleurs. Le président-politicien a malheureusement d’autres préoccupations, à ses yeux de loin prioritaires : terminer les deux infrastructures et d’autres, pour les inaugurer en janvier 2019. Le président-politicien va mobiliser alors toute la République et même au-delà du pays. Il saisira l’opportunité pour manipuler comme il sait le faire en pareilles circonstances. Il va, en particulier, frapper fortement l’imagination des populations les moins averties avec son TER et l’Autoroute « Ila Touba » flambant neuf. On imagine parfaitement l’ampleur que prendront ces deux cérémonies et l’impact qu’elles pourront avoir sur des populations analphabètes et même sur d’autres, qui ne s’attarderont pas sur les coûts exorbitants, les probables fortes surfacturations de ces deux infrastructures. Celles-ci ne nous coûteront pas, nous l’avons déjà indiqué, moins de 1500 milliards de francs CFA, qui auraient pu servir bien plus utilement à relier Dakar et Ziguinchor par voie de train et réhabiliter les chemins de fer Dakar-Thiès, Thiès-Saint-Louis, Thiès-Kaolack, Kaolack-Guinguinéo, Louga-Linguère, etc. Une gare pourrait être construite alors à Diamniadio d’où partirait un embranchement de moins de trente kilomètres, qui rejoindrait l’Aéroport international Blaise Diagne. On se passerait ainsi de ce coûteux et impertinent TER, au profit de la renaissance d’activités économiques tout au long des voies nouvelles ou réhabilitées. Tout au long de ces voies ferroviaires aujourd’hui mortes, les gares grouillaient de monde au moment du passage des trains, qui étaient l’occasion de déploiements d’activités économiques importantes. Nous aurions préféré ce choix lucide à quelque infrastructure de dernière génération que ce soit. Selon un proverbe wolof bien de chez nous, «  ku sa ab sèr jottul, doo boot ay gámb ». Traduit en français, ce proverbe donne : « Quand on ne dispose pas du minimum, on ne doit pas avoir l’outrecuidance de prétendre au maximum. »

 

Nous devons donc rester vigilants devant les infrastructures du président politicien. Une gouvernance ne se réduit pas à construire des infrastructures, surtout quand elles sont fortement surfacturées. Une gouvernance, c’est aussi des valeurs, des principes. Et c’est lui-même, le président-politicien, qui faisait pareille déclaration lors de la campagne électorale pour l’élection présidentielle de 2012. Elu, il la jette par-dessus bord avec tous les engagements qu’il avait pris et toutes les promesses qu’il avait faites. Tout le monde se les rappelle et je n’y insisterai pas. Le candidat devenu malheureusement président de la République est tout autre : nos valeurs cardinales ne retiennent plus son attention. Il n’y croit même plus finalement. C’est du moins l’impression qu’il donne. En particulier, la parole donnée n’a plus pour lui aucune espèce d’importance. En tout cas, sa parole à lui ne vaut plus un copeck. Une expression est de plus en plus employée chez nous : « Waxi Macky Sall, du ma ci dòor sama doom. » En d’autres termes, dans les maisons, dans les bureaux, lors des manifestations, partout dans le pays, personne n’accorde plus aucune espèce d’importance à sa parole. Pas seulement d’ailleurs ! C’est sa propre personne qui est contestée maintenant. Il ne bénéficie plus du respect dû à un président de la République car, il ne se comporte plus comme tel, s’il s’est jamais comporté comme tel d’ailleurs. Il est tout le contraire de la sobriété, de la transparence, de la vertu. Il a désacralisé la fonction présidentielle comme d’autres fonctions importantes. Il a transformé le palais de la République en siège de son parti et de sa coalition. Des gens venus de nulle part y entrent et en sortent à longueur de journée. Parfois, il devient carrément une arène lutte où des gens se battent rageusement pour se partager l’argent qu’il leur a donné à l’issue de leur audience.

 

Il est devenu comme un roi, un buur qui fait ce que bon lui semble. Il est particulièrement friand de louanges et est bien servi par la meute de griots et de minables courtisans qui l’accompagnent dans toutes les cérémonies, principalement lors de ces innombrables et folkloriques inaugurations d’infrastructures. Non content des tombereaux de louanges qu’on déverse sur sa personne, il permet même à ses griots de couvrir publiquement l’opposition d’injures. Demain, ils l’insulteront avec sa distinguée épouse et couvriront de louanges ses opposants qu’ils insultent aujourd’hui. C’est cela le Sénégal qu’il nous a construit pendant plus de six ans. 

 

Je n’oublierai pas l’esquisse de quelques pas de danse, plus précisément sa danse lors de l’inauguration de l’Aréna, curieusement applaudi par les présidents d’institutions, les ministres, les députés et, pratiquement toute la République. Ses minables courtisans, prenant le devant des critiques qui n’allaient pas manquer, se sont mis rapidement à le défendre, avec l’argument éculé que le président Nelson Mandela dansait, que le président Cyril Ramaphosa lui aussi danse. Les pauvres ne savent pas que nous sommes au Sénégal, pas en Afrique australe où la danse des chefs fait partie de la tradition. Au Sénégal, le chef, le buur, le kilifa ne dansent pas. Fii ci Senegaal, kilifa du fi fecc. Xel nangu wu ko fi. Jekkul, rafetul. On m’a raconté qu’un Damel du Kayor dont je ne me souviens plus du nom, aurait été destitué pour avoir seulement esquissé quelques pas de danse. Notre président-politicien, grisé par le pouvoir et préoccupé au plus haut point par sa réélection, ne sait plus faire la distinction entre la décence et l’indécence, le licite et l’illicite, lu xel nangu ak lu xel nangu wul. Nguuru rek a ko ñor. Traduit en français, cela signifie qu’il piétine toutes nos valeurs, et que seul le pouvoir l’intéresse.

 

Le président-politicien va donc manipuler, manipuler, frapper fortement les imaginations en usant d’autres subterfuges comme la « modernisation des cités religieuses », la « couverture maladie universelle », les « bourses de sécurité familiale », « La délégation générale . . . . . . à la solidarité nationale », « Le Fonds de Solidarité nationale », etc. Pour ne s’arrêter que sur la « modernisation des cités religieuses », des dizaines, voire des centaines de milliards du contribuable y sont engloutis sans contrôle, gérés exclusivement par un couple, à partir du « cabinet d’architecture » de la présidence de la République. Imagine-t-on une telle structure, installée à l’Elysée, pour construire ou moderniser des Églises et des chapelles ?

 

Le président-politicien et son clan ne reculeront donc devant aucun obstacle, fût-il la loi, pour s’assurer une victoire confortable en 2019, et dès le premier tour. Ils vont rivaliser d’ardeur à acheter des consciences à coût de milliards de francs CFA. Ils nous ont déjà administré la preuve de ce dont ils sont capables dans ce domaine-là. Ils vont enfourcher d’autres chevaux de bataille pour renforcer la machine infernale qui va les conduire directement à la victoire. Ces gens-là ne sont surtout pas des enfants de chœur, et il faudra plus que la croix et la bannière pour leur barrer la route vers la réalisation de la mission qu’ils se sont fixée. Gagner ou périr, telle est leur devise.

 

Malgré les nombreux dysfonctionnements qui les ont entachées, les élections législatives du 30 juillet 2017 ont été révélatrices à plusieurs égards. Elles nous ont laissé l’impression que l’opposition, par ses divisions parfois artificielles et, partant, stériles, n’est pas encore à la hauteur des enjeux. Pour nombre de nos compatriotes, ses membres sont davantage attachés à des intérêts particuliers qu’à l’intérêt général. Pour d’autres, les élections législatives du 30 juillet n’ont pas permis de faire émerger des rangs de l’opposition, un homme ou une femme susceptible de pouvoir faire face au président-politicien et à sa redoutable machine électorale. Un homme ou une femme, même de qualité, n’y suffirait pas d’ailleurs. Il faudrait d’abord s’orienter vers l’élaboration d’un programme alternatif à celui que le président-politicien est en train de mettre en œuvre, et qui s’appellerait « Programme alternatif commun (PAC) ». Ce texte a pour, entre autres objectifs, d’appeler autour de l’élaboration de ce « PAC ». Comment l’élaborer ? Avec qui l’élaborer ? Comment rassurer nos compatriotes, qui ne croient plus à la parole des politiciens ? Comment gagner leur confiance et les convaincre que les porteurs de ce programme ne seront pas comme les autres, que leurs différents engagements ne finiront pas dans la poubelle, comme le sont ceux du président-politicien et de son prédécesseur ? Quelle femme ou quel homme portera-t-il (elle) le « PAC », une fois qu’il sera élaboré ? Comment sera-t-il (elle) désigné (e), etc. ? C’est à toutes ces questions, et à d’autres, que l’auteur de cet appel tentera  de répondre, avec ses idées, ses maigres idées de profane qu’il continuera de développer dans la contribution suivante.

 

Dakar, le 26 septembre 2017

Mody Niang

 
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